Quand le symptôme est regardé hors de sa dimension psycho-sociale

Enfants hyperactifs, autistes... 

"Toute différence devient pathologique, s'inquiète un pédopsychiatre 

Hyperactifs, autistes... le nombre d'enfants diagnostiqués augmente depuis quinze ans. Malheureusement, cette hausse est également la conséquence d'erreurs de diagnostics, estime Thierry Delcourt dans "La fabrique des enfants anormaux".



Extraits de l'article de Florence Morel, publié  le sur France Info Grand Est


Depuis 15 ans, le nombre d'enfants diagnostiqués hyperactifs ou ayant des troubles de la sphère autistique, a considérablement augmenté. Sans remettre en cause l'existence de ces troubles et la nécessité de les dépister dès le plus jeune âge, le médecin attribue cette hausse à des erreurs de diagnostic. Des errements imputés à des bilans neuro-développementaux expéditifs, qui ne prennent pas en compte le contexte psychologique et social dans lequel l'enfant évolue. Problème, ces erreurs entraînent parfois des traitements médicamenteux lourds et des programmes de rééducation (comme l'orthophonie, l'orthopsie, etc.) inadaptés pour des enfants dont la souffrance est ailleurs.

(...) Ce mode de pensée nous vient des Etats-Unis, où la situation est affolante. Mais on y plonge les deux pieds en avant. D'une part, parce qu'on a adopté ce qu'on appelle le DSM, le manuel de diagnostic thérapeutique, qui fait que chaque trouble est identifié et qu'à chaque trouble correspond un médicament.

(...) nous sommes en partie otages d'un marché pharmaceutique qui occupe une grande place, y compris dans la formation des médecins. Et parce qu'il est beaucoup plus facile d'avoir une pensée réductrice. Si on pense un problème psycho-social, on va penser l'enfant dans un problème plus général, qui va toucher la société, y compris la question politique. Alors que si on ne traite que son cerveau, que l'on considère comme anormal, on ne va pas aller plus loin que ça. 
C'est cette dérive que je veux dénoncer. Plutôt que de penser un problème dans sa globalité, on a trouvé un moyen bien plus facile d'y répondre, en relevant les troubles neuro-développementaux des enfants. A chaque trouble va correspondre une réponse, que l'on a répertoriée dans trois catégories. (note perso: les 3 troubles: trouble de la sphère autistique, déficit de l'attention avec hyperactivité, les DYS...)
Ce qui est piégeux, c'est qu'à chaque élément correspond une réalité. C'est-à-dire qu'il existe des enfants avec des troubles néonataux, génétiques ou autres, mais c'est une fraction infime de notre patientèle. Il existe des enfants qui ont un trouble neuro-développemental du côté de l'autisme, des troubles de l'attention avec de l'hyperactivité. Et puis il y a des enfants qui ont des troubles instrumentaux qu'on surnomme les "DYS", mais qui représentent eux aussi une petite fraction de la population. Et on fait rentrer les autres enfants dans ce grand fourre-tout alors qu'ils n'ont rien à y faire.

Un moyen d'éluder toutes les questions politiques qui se cachent derrière le mal-être de ces enfants dites-vous?

Exactement. La plupart des enfants que je reçois dans cette situation sont des enfants qui sont issus de quartiers défavorisés, qui ont souvent des conditions psycho-sociales difficiles, avec des décalages culturels et des situations où ils ne peuvent pas forcément être dans le calme (...) 
Quand ils viennent ici, j'essaie de prendre en compte tout l'aspect psycho-social et de leur accorder du temps. Souvent, un suivi psychothérapeutique suffit. (...)

Quand on est jeune parent, ou qu'on ne dispose pas du bagage culturel suffisant pour venir se
renseigner… on va d'autant plus subir ce genre de dérives. Ce que je constate, c'est que dans des quartiers comme Croix-Rouge et Orgeval, il y a beaucoup plus d'enfants qui sont traités sur ce mode de rééducation ou de traitements médicamenteux, comme la Ritaline pour l'agitation, ou des neuroleptiques.

(...) dans mon livre, je cite deux cas dans lesquels il y a une résistance de l'enfant. On lui donne un traitement ou on le soumet à une rééducation, mais comme son problème psychique n'est pas traité, il va redoubler d'agitation ou de repli. Dans ces cas-là, le DSM a une réponse toute faite qui s'appelle le TOP, le trouble oppositionnel avec provocation. Autrement dit, il ne suffit pas de grand-chose pour qu'un enfant qu'on ne comprend pas arrive dans cette position. (...)
 

Lire la totalité de l'article

https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/marne/reims/entretien-enfants-hyperactifs-autistes-toute-difference-devient-pathologique-regrette-un-pedopsychiatre-remois-2067151.html?fbclid=IwAR2aUXotleGqTvvFpkzvDOWx06Apf2hlY602GPDvVliJq4KEMi_UwdKPjck




Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Hommage à Jean-Claude Abric

Décès de Serge Moscovici

La peur sociale